Etudes de marché : une réponse incomplète à un vrai besoin

Etudes de marché contre études stratégiques : quel gagnant pour le développement des PME-PMI? Résumé : Pour un développement efficace, pour aller sur de nouveaux marché ou encore créer une nouvelle activité, il est admis qu’une étude de marché doit être menée. Mais une étude de marché est-elle suffisante ? Qu’est-ce qu’une étude de marché exactement ? Cet article a pour objectif d’en définir et clarifier les objectifs puis, en tracer les limites qui déterminent la nécessité d’utiliser les outils de la stratégie. En effet, les études de marché permettent de répondre à un problème ou une question marketing précise mais ne permettent pas de répondre à des besoins profonds de l’entreprise : Comment me développer ? De quelle manière ? Comment me différencier de la concurrence ? Quelle cible viser ? Quelle communication adopter ? Ces questions trouvent des réponses dans la stratégie d’entreprise. Cet article donne les bases de réflexion nécessaires pour que les chefs d’entreprises puissent déterminer quelle type d’étude est la plus adaptée à leurs besoins et leurs attentes. Il est admis, par habitude, que réaliser une étude de marché est une étape suffisante dans la démarche de développement d’une société. Mais une étude de marché est-elle la réponse ? Qu’est-ce qu’une étude de marché exactement ?D’après l’ESOMAR [1], « les études de marché ont pour objectif d’analyser les marchés de produits et de services de toute nature. Elles consistent en particulier à étudier de façon systématique le comportement, les attitudes et les opinions des personnes physiques et morales ». Cette définition permet de délimiter l’objectif d’une étude de marché : il s’agit d’évaluer les risques et de les minimiser en permettant de mettre en place une stratégie marketing adéquate pour un produit donné dans un contexte bien défini.Quand utiliser une étude de marché ? Dans quel but ? Pour répondre à toutes ces questions, une partie de cet article définira les études de marché, leurs avantages et inconvénients puis, abordera leur pertinence par rapport à certaines problématiques courantes des sociétés qui désirent se développer.

Les études de marché : objectifs Les études de marché sont des outils qui permettent de répondre à une ou plusieurs questions ponctuelles et précises. Elles sont étroitement associées au développement d’une marque, de son image et ont un impact sur le marketing du ou des produits étudiés.Si l’étude de marché a pour objectif de faciliter une décision rationnelle sur un point marketing précis, elle est également souvent utilisée par des managers pour retarder leur décision, leur donnant un délai supplémentaire de réflexion, mais ne leur permettant pas de décider.Une étude de marché peut s’orienter vers trois types d’objectifs : (i) un objectif exploratoire, l’idée est d’identifier les grandes lignes d’un problème (comment améliorer le produit ?) (ii) un objectif descriptif, qui permet d’apporter des informations objectives (quelle est notre image actuelle ? Qui sont nos clients ?) (iii) un objectif comparatif, qui permet de comparer plusieurs solutions (quel est le meilleur slogan pour notre produit? Faut-il modifier nos prix ?).Pour répondre à ces objectifs, il existe deux grandes familles de techniques pour traiter l’information et répondre à ces objectifs : la démarche qualitative et la démarche quantitative.

La démarche qualitative La démarche qualitative est caractérisée par sa nature exploratoire. Elle est utilisée pour l’étude d’un domaine inconnu (marché, produit, consommateur, environnement…) et permet de dégrossir un problème en identifiant et en recensant ses différents composants. Elle se fonde sur l’interrogation d’individus, l’analyse de leur discours et de leur comportement. L’échantillon n’est en général pas représentatif et la taille de l’échantillon est réduite (inférieur à 20 personnes) [2].La collecte d’information se fait soit par des entretiens individuels soit par l’observation des comportements.Dans le cas d’entretiens individuels, on peut opter pour une méthode directive (l’entretien suit un canevas précis) qui permettra de recueillir des informations objectives et d’étudier la perception d’un objet ou d’un service. On peut également opter pour des méthodes non directives qui font appel à l’analyse de la psychologie des individus. Ces méthodes partent du postulat que les comportements des individus sont influencés par des éléments que l’individu ne maîtrise pas lui-même (pulsions, inhibitions, refoulements, a priori et jugements affectifs). Elles se basent par sur des théories telles que la psychanalyse, l’analyse transactionnelle, mais également sur l’analyse de la syntaxe, du vocabulaire, des thèmes abordés.Plutôt que d’être interrogé, un individu peut être observé et suivi grâce à diverses méthodes qui permettent de noter ses comportements d’achat. Les méthodes d’observation ont cependant pour inconvénient d’être difficiles à interpréter car elles sont très subjectives. Par exemple, l’observateur peut noter l’intérêt d’un client pour un produit alors que celui-ci s’est arrêté car il avait besoin de repos. Par ailleurs ces techniques d’observation ont un coût très élevé à cause du temps nécessaire à mener ces études et de la formation importante des observateurs. Dans la même lignée, il existe des techniques d’observation spécifiques à l’observation de groupes, réunis au sein d’une même pièce.Toutes ces méthodes d’étude du langage et du comportement sont complexes et doivent être menées par des cabinets spécialisés. Elles ont un objectif très précis : déterminer l’impact du design, du prix, de la communication… sur le consommateur pour permettre d’apporter les modifications nécessaires à son produit pour vendre plus. C’est une démarche souvent utilisée pour les produits de grande consommation.

La démarche quantitative La démarche quantitative, parfois appelée sondage, respecte les exigences statistiques et la représentativité de la population étudiée. Les lois statistiques sur lesquelles repose l’approche quantitative conduisent à des tailles d’échantillon importantes, variant entre 200 et 2000 personnes. Le choix des échantillons est très strictement défini à travers diverses méthodes d’échantillonnage plus ou moins aléatoires et plus ou moins empiriques ; la taille de l’échantillon est calculée au mieux pour répondre à une question donnée. Les méthodes d’analyse utilisent des outils mathématiques tels que les analyses de régression, les calculs de coefficient de corrélation, les analyses multivariées, etc. Les personnes sont sondées par des questionnaires standardisés et fermés, c’est à dire avec des réponses prédéfinies.L’approche quantitative montre ses limites lorsque l’objectif de l’étude n’impose pas la représentativité statistique de l’échantillon, lorsque la cible est étroite (quelques gros clients) ou encore lorsque la cible est très homogène par rapport au sujet d’étude.Dans tous les cas, il faut rester prudent sur l’utilisation de ces études de marché car elles indiquent ce que souhaite le client « moyen ». Il est conseillé de compléter ce type d’étude de marché par une étude qualitative.

Les études de marché : une réponse incomplète à un véritable besoin Les entreprises qui désirent se développer font parfois appel à des cabinets de conseil pour des études de marché. Le cahier des charges défini par l’entreprise liste la nécessité de faire le point sur les concurrents, d’identifier les technologies concurrentes, de décider d’un positionnement sur le marché, de déterminer les axes de son développement. Or, les objectifs définis ci-dessus ne peuvent pas trouver de réponse dans des études de marché par définition restrictives. En réalité, les questions soulevées relèvent du domaine de l’étude stratégique [3]. La confusion entre étude stratégique et étude de marché est alimentée par l’utilisation de certaines techniques de l’étude de marché qualitative lors de l’étude stratégique. Cette confusion est alimentée par la présence de certains outils de la stratégie dans des ouvrages traitant de marketing [4]. Si cette confusion paraît mineure, elle peut avoir des conséquences néfastes (i) quand une entreprise s’adresse à un cabinet conseil car il peut y avoir confusion entre les besoins réels de l’entreprise et la prestation correspondante (ii) quand les enjeux sont importants et que l’entreprise doit réussir son développement.

Conclusion Les études de marché, au sens strict du terme, répondent à des questions marketing précises et très ciblées.Par abus de langage, on parle également d’études de marché quand il s’agit en réalité d’études stratégiques. Si cette confusion semble mineure, elle peut avoir un impact néfaste sur l’entreprise qui utilise alors des outils inadaptés à sa problématique. C’est pourquoi il est nécessaire, avant de contacter un prestataire, de savoir si les besoins concernent (i) le marketing de ses produits (ii) l’analyse du système concurrentiel de son industrie (iii) la stratégie à adopter pour déterminer ou optimiser son développement. Les études de marché ne sont adaptées qu’au premier cas [5], les deux autres cas trouvant des solutions dans une étude stratégique [6,7].

Références

  1. Code international de pratiques loyales en matière d’études de marché et d’opinion, document CCI/ESOMAR, novembre 1972.
  2. Giannelloni J-L, Vernette E: Approche qualitative de l'étude de marché. In Etudes de marché, edn 2e. Edited by: Vuibert; 2001:p69.
  3. Massol P: Développez durablement votre entreprise. Le Scialytique 2004, 22:4-6 (article joint dans ce dossier)
  4. Kotler P, Kinzer C: Analyser le marché. Conquérir le marché grâce à la planification stratégique. In Marketing Management, edn 11th. Edited by: Pearson; 2002.
  5. Dans le cas où un chef d’entreprise pense pouvoir répondre à son problème par une étude de marché telle que définie dans cet article, il est important de noter qu’une proposition d’étude faite par un cabinet doit présenter 5 rubriques : (i) objectifs : définition des questions prioritaires auxquelles devra répondre l’étude. Ces objectifs sont hiérarchisés et doivent être limités à 4 ou 5 questions. (ii) méthodologie : devra être décrite la méthode de collecte de l’information (interviews/observations), les méthodes d’analyse, les variables à évaluer, l’échantillon (population visée, taille de l’échantillon , lieu et date de collecte, relances prévues…), les modes de recueil (à domicile, téléphone, poste, internet), traitement statistique des données (iii) délais : généralement de 1 à 5 mois (iv) le coût (v) les modalités de règlement, en général 50% à la commande, 50% au rendu du rapport.
  6. Massol, P. L’étude stratégique pour anticiper le futur et gagner des parts de marché sur http://www.apce.com/index.php?rubrique_id=61&type_page=I&tpl_id=44&contenu_id=1176567
  7. Massol, P. Etude stratégique : définissez un cahier des charges pour faire appel à des consultants : http://www.cyberpro.fr

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